Au plus près de la mobilisation des chauffeurs Uber


Brahim Ben Ali (à gauche) annonce en direct aux militants qui le suivent que la Commission européenne a reconnu une présomption de salariat pour les chauffeurs Uber, en décembre 2021.

FRANCE 2 – MERCREDI 26 OCTOBRE À 22 H 50 – DOCUMENTAIRE

Les témoignages se bousculent sur le téléphone de Brahim Ben Ali, qui tente depuis plusieurs années de mobiliser les chauffeurs Uber. Une conductrice, très bien notée, déconnectée de l’application du jour au lendemain ; une autre, sanctionnée après avoir été agressée par des clients irascibles…

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Ces hommes et ces femmes, Benjamin Carle et Ella Cerfontaine les ont suivis de longs mois dans leur combat pour obtenir de meilleures conditions de travail. La litanie des situations injustes parcourt A bout de course, documentaire qui synthétise des années de luttes.

Derrière des dizaines de « petites » injustices, il y a la grosse : soutenus par l’avocat Jérôme Giusti, ces chauffeurs estiment qu’ils ne sont pas des travailleurs indépendants, comme l’affirme le géant américain du transport de personnes, mais des salariés déguisés. Ils ne sont pas libres de fixer leurs tarifs, de contacter directement leurs clients… Autant d’éléments qui les placent dans une situation de subordination directe, mais sans aucun des avantages du salariat – congés payés ou arrêts maladie.

Pratiques douteuses

Mais comment le prouver devant les prud’hommes, alors que les chauffeurs sont, en majorité, peu portés sur la syndicalisation et font face à une puissante multinationale ? « Tous les anciens, ils ne sont plus là, tous ceux qui étaient avec nous, ils ont arrêté, il y en a plein qui sont passés agents de sécurité », constate M. Ben Ali.

Le documentaire montre l’envers du décor, plus personnel, de cette mobilisation ; Brahim Ben Ali, gouailleur et « grande gueule » dans les reportages télévisés, dans ses moments de doute, expliquant à son jeune fils pourquoi son père est si souvent absent. Jusqu’à cette première grande victoire obtenue, à Bruxelles, lorsque la Commission européenne reconnaît une présomption de salariat pour les chauffeurs Uber.

Et puis, cette rencontre inattendue : Mark MacGann, mondialement connu aujourd’hui comme le lanceur d’alerte des « Uber Files », contacte Jérôme Giusti et lui ouvre ses carnets, montrant la subordination des chauffeurs. « J’ai honte, dit M. MacGann devant la caméra. On était censé investir dans les villes, les quartiers défavorisés (…) et je ne peux pas dormir en sachant que j’ai ma part de responsabilité dans ce montage qui utilise et jette des êtres humains comme du bétail. »

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Contrôles de l’Urssaf, coupures d’accès lors des perquisitions, rencontres avec les ministres et chefs de gouvernements : les pratiques douteuses détaillées dans les « Uber Files » serviront à nourrir l’argumentaire des chauffeurs aux prud’hommes. Face à la longueur des procédures, ils préparent le coup d’après : leur propre plate-forme de VTC, dont le lancement est prévu en 2023, avec déjà 500 chauffeurs. Elle sera gérée par une coopérative qui leur donnera – enfin – des protections sociales similaires à celles des salariés.

A bout de course, documentaire de Benjamin Carle et Ella Cerfontaine (Fr. 2022, 62 min.), « Infrarouge » sur France 2.



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Catégorie article Politique

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